FSPF : « Un demi-milliard en moins, c’est le coup de massue de trop »
Lors d’un webinaire de rentrée ce mercredi 3 septembre, Philippe Besset a détaillé la riposte de la FSPF contre l’arrêté du 4 août plafonnant les remises génériques. Entre recours au Conseil d’État, interpellation de Matignon et offensive parlementaire, la profession enclenche une séquence politique et médiatique pour revenir au plafond de 40 % et préserver l’équilibre économique des officines.

Trois leviers actionnés en même temps
Le ton est posé d’emblée : la Fédération assume un « conflit clair » avec l’exécutif et active simultanément trois voies. D’abord, une issue politique : obtenir de Matignon un moratoire puis un retrait pur et simple de l’arrêté. Ensuite, une voie judiciaire : un recours en annulation est déposé devant le Conseil d’État, sur le fond comme sur la méthode (absence d’étude d’impact préalable). Enfin, une voie législative : faire réinscrire dans la loi le plafond de remise à 40 % (article L.138 du CSS), avec demande d’un rapport d’ici 2027 pour reposer, sereinement, les bases d’un nouveau modèle de rémunération officinal.
Nous sommes en conflit avec l’exécutif ; nous activerons aussi le judiciaire et le législatif.
Une séquence de mobilisation structurée
La FSPF maintient la grève des gardes, assortie d’une suspension du tiers payant lors des réquisitions. Point d’orgue annoncé : une grève nationale le 18 septembre, déclinée en régions, avec un dispositif de suivi en direct pour donner l’écho le plus large aux actions locales. Sur le terrain médico-social, la Fédération appelle à renégocier les contrats de préparation des doses administrées (PDA) en EHPAD : l’acte n’est ni encadré par un cahier des charges national ni rémunéré, ce qui expose à l’insécurité juridique et n’est plus soutenable dans le contexte actuel.
Préparer gratuitement les piluliers des EHPAD, sans cadre juridique, ce n’est plus possible.
Des outils pour objectiver la crise
Pour nourrir le débat public, deux plateformes sont mises au service de la mobilisation. La première, une carte interactive des fermetures, recense en temps réel les disparitions d’officines : depuis janvier 2025, environ 30 pharmacies ferment chaque mois et aucune ouverture n’est enregistrée. Au-delà des chiffres, l’outil documente l’impact humain, notamment dans les communes où l’unique officine a baissé le rideau. La seconde, jesoutiensmapharma.fr (lancement prévu le 18 septembre), publiera les prises de position individuelles des députés et sénateurs sollicités pour soutenir l’amendement rétablissant le plafond à 40 %. Objectif assumé : rendre visible, circonscription par circonscription, la majorité nécessaire.
L’équation économique : 520 M€ en moins
Selon la FSPF, la baisse du plafond de remise sur les lignes aujourd’hui à 40 % représente 520 millions d’euros de marge en moins d’ici 2027. À cela pourrait s’additionner l’effet mécanique des baisses de prix (CEPS), qui compriment la base sur laquelle s’appliquent les remises : un cocktail défavorable pour des entreprises déjà fragilisées, en particulier les petites structures où « 5 000 à 10 000 € » de perte nette peuvent faire basculer l’équilibre. Le message est sans détour : on ne change pas un pilier économique de cette ampleur sans étude d’impact ni mesures de compensation synchrones.
C’est la première fois qu’on met en place une réforme à 500 millions sans étude d’impact.
Franchises : le point de rupture
Autre ligne rouge : le doublement des franchises présenté par décret avant débat parlementaire, avec un plafond cumulé qui atteindrait 200 € (100 € pour médicaments/actes paramédicaux + 100 € pour consultations et examens). Au-delà du signal, la Fédération juge ingérable toute collecte au comptoir, synonyme de fin de facto du tiers payant généralisé. Surtout, le dispositif est perçu comme une rupture du principe fondateur de la Sécurité sociale — on ne paye plus selon ses moyens, mais selon ses besoins — avec un impact concentré sur les patients polypathologiques, grands consommateurs de soins.
Le maillage, marqueur d’égalité territoriale
La Fédération replace enfin la pharmacie de proximité au cœur de l’aménagement du territoire. Chaque fermeture, a fortiori lorsqu’elle touche la seule officine d’une commune, accélère la désertification. Garder l’officine ouverte, c’est maintenir un hub de santé de premier recours, faciliter l’orientation, accueillir la télémédecine, et préserver des services essentiels où l’école, la poste ou l’épicerie ont parfois déjà disparu.
Prochaines étapes
Au calendrier immédiat : rencontres avec les cabinets ministériels et Matignon, coordination intersyndicale, et montée en puissance de la mobilisation jusqu’au 18 septembre. La discussion se prolongera au Congrès des pharmaciens (11-12 octobre), où l’économie et le rôle sociétal de l’officine seront débattus à haute intensité, avec des intervenants politiques de premier plan.