Pénuries de médicaments et renoncement aux soins : le défi des pharmaciens face aux attentes des Français
Le baromètre 2024 de Pharmacie Lafayette, réalisé avec l’IFOP, dresse un portrait alarmant des attentes des Français vis-à-vis des pharmaciens. Entre difficultés d’accès aux soins et rôle central des officinaux, cette étude révèle une profonde inquiétude quant à l’avenir de la santé publique en France.
Un accès aux soins de plus en plus compliqué
Les difficultés d’accès aux soins se confirment. Selon l’étude, plus d’un Français sur deux (53%) juge compliqué d’obtenir un rendez-vous médical près de chez lui, et 62% considèrent qu’il est difficile de trouver une consultation dans un délai acceptable pour leur état de santé. En conséquence, 44% des Français avouent avoir renoncé à consulter un médecin faute de créneaux disponibles, tandis que 40% se heurtent au problème de l’éloignement géographique.
Face à cette situation, le pharmacien se révèle être un acteur de santé de premier plan. En l’absence de disponibilité de leur médecin généraliste, 42% des Français se sont tournés vers leur officine pour obtenir des conseils de santé. Cette tendance met en lumière l’importance croissante des pharmaciens dans le système de soins, bien au-delà de leur rôle de dispensateurs de médicaments.
Une prise en charge financière de plus en plus lourde
La question du pouvoir d’achat dans le domaine de la santé devient également un enjeu majeur. Près de six Français sur dix (59%) constatent une augmentation de leurs dépenses de santé au cours des dernières années. Cette pression financière pousse certains à des arbitrages lourds de conséquences : 36% des sondés ont déjà renoncé à acheter un médicament ou un traitement en raison de son coût, et 39% ont opté pour le conseil d’un pharmacien afin d’éviter le paiement d’une consultation médicale.
L’augmentation de la franchise médicale, mise en place depuis le 31 mars 2024, est largement contestée par la population : 61% des Français la considèrent comme illégitime. Pour beaucoup, elle constitue une barrière supplémentaire à l’accès aux soins, fragilisant encore davantage les patients les plus précaires.
La pénurie de médicaments : un problème prioritaire
Les ruptures de stock de médicaments s’imposent comme la principale préoccupation des Français. Pour 63% des répondants, la lutte contre la pénurie de certaines molécules est le défi numéro un des pharmacies. Les raisons de cette crise sont multiples : interruptions de production, difficultés d’approvisionnement en matières premières, ou encore dépendance excessive à certains marchés étrangers. Ce problème met les pharmaciens en première ligne, contraints de jongler avec les stocks disponibles et de proposer des alternatives thérapeutiques lorsqu’un médicament essentiel vient à manquer.
En parallèle, 48% des Français attendent des pharmacies qu’elles développent des services additionnels, comme la téléconsultation ou les entretiens de santé. Pour les plus jeunes, ces services innovants sont même perçus comme des éléments essentiels de l’officine de demain.
Les services élargis du pharmacien : encore méconnus du grand public
Si le dépistage du Covid-19 en pharmacie est désormais bien identifié (93% des Français en ont connaissance), d’autres services restent encore trop méconnus. Seulement 51% des interrogés savent que les pharmaciens peuvent prescrire des antibiotiques en cas d’angine ou d’infection urinaire après un test de dépistage positif. De même, le service de téléconsultation n’est connu que par 48% des sondés, et seulement 6% l’ont déjà utilisé.
L’étude montre que les jeunes (18-24 ans) sont plus enclins à utiliser ces services digitaux. Ils sont 85% à connaître ou à envisager d’utiliser la téléconsultation en pharmacie, soit 11 points de plus que la moyenne nationale. Cette donnée révèle un potentiel à exploiter pour renforcer l’accès aux soins auprès d’une population plus connectée et en demande de solutions rapides.
Un rôle central, mais des missions à valoriser
Les résultats de ce baromètre 2024 démontrent l’importance croissante du pharmacien comme premier recours en matière de santé. Toutefois, pour Stéphane Solinski, directeur général de Pharmacie Lafayette, il reste encore beaucoup à faire pour valoriser ces missions élargies : « Le pharmacien, premier relais de santé de proximité, doit être mieux intégré dans le parcours de soins. En réponse aux problématiques d’accessibilité et de renoncement aux soins, il est essentiel de faire connaître les nouveaux services offerts en officine. »
La montée en puissance du pharmacien dans le domaine du conseil et de la prévention, ainsi que son implication dans des actes de soins plus techniques, comme la vaccination ou le dépistage, témoignent d’une évolution rapide du métier. Pour que cette transformation soit pleinement efficace, il est indispensable de renforcer la communication et la formation des patients sur ces nouvelles offres, et d’intégrer le pharmacien au cœur des politiques de santé publique.
Référence : étude Pharmacie Lafayette & IFOP, “Les attentes des Français vis-à-vis des pharmaciens”, réalisée en ligne du 30 avril au 2 mai 2024 auprès de 1015 personnes représentatives de la population française âgée de 18 ans et plus.