« Je voudrais des oméga 3 » : que conseiller au comptoir ? Guide pratique
Quand un patient demande "des oméga-3" au comptoir, la question mérite d'être creusée. Prévention cardiovasculaire, mémoire, fatigue, équilibre général... les motivations sont multiples. À nous d'en saisir le sens pour orienter vers la formule la plus adaptée et la plus sûre. Derrière ces "bons gras" se cache bien plus qu'une simple complémentation : un véritable levier de santé à redécouvrir.
Mieux comprendre ces acides gras
Les oméga-3 appartiennent à la grande famille des acides gras polyinsaturés. Trois formes principales sont à distinguer :
ALA (acide α-linolénique), d’origine végétale, essentiel car non synthétisé par l’organisme,
EPA (acide eicosapentaénoïque) et DHA (acide docosahexaénoïque), à longue chaîne, présents dans le monde marin ou de micro-algues.
La conversion de l’ALA en EPA et DHA demeure très limitée : environ 5 à 8 % pour l’EPA et 0,5 à 4 % pour le DHA, selon le statut nutritionnel, le sexe et l’excès d’oméga-6.

Ces acides gras assurent plusieurs fonctions vitales : maintien de la fluidité membranaire, régulation de l’inflammation, soutien de la fonction cardiaque et transmission nerveuse. Ils participent aussi à la synthèse de médiateurs dits pro-résolutifs qui favorisent la résolution des processus inflammatoires. Un déficit chronique s’accompagne souvent d’un état inflammatoire silencieux, d’un déséquilibre lipidique ou d’un ralentissement cognitif progressif.
Ne pas confondre
Oméga-3 : ALA, EPA, DHA : effet anti-inflammatoire, cardio-protecteur, neuroprotecteur.
Oméga-6 : acide linoléique, arachidonique : pro-inflammatoires s’ils dominent l’alimentation.
Oméga-9 : acide oléique (huile d’olive) : non essentiel, bon pour la diététique méditerranéenne.
Entre EPA, DHA, oméga-3-6-9
Parmi les oméga-3, les formes à longue chaîne EPA et DHA présentent l’intérêt physiologique le plus documenté.
L’EPA agit sur le plan cardiovasculaire : il abaisse les triglycérides, limite la synthèse des eicosanoïdes pro-inflammatoires et protège l’endothélium vasculaire.
Le DHA, composant majeur du cerveau et de la rétine, soutient la mémoire, la vision et le développement neurologique fœtal.
Selon l’EFSA, les apports recommandés sont de 250 mg/j d’EPA + DHA pour l’adulte, 450 à 500 mg/j chez les personnes à risque cardiovasculaire, et + 200 mg/j de DHA pendant la grossesse ou l’allaitement.
Les oméga-6 (huiles de tournesol, de maïs, de soja), très présents dans l’alimentation occidentale, deviennent délétères lorsqu’ils dominent l’apport lipidique, car ils favorisent la formation de médiateurs pro-inflammatoires.
Les oméga-9 (huile d’olive) sont bénéfiques mais non essentiels.
L’enjeu n’est donc pas de « cumuler les apports 3-6-9 », mais de rétablir un ratio équilibré en faveur des oméga-3, seuls capables de contrebalancer l’excès d’oméga-6.
Microbiote, inflammation et cerveau
Les recherches récentes explorent le lien entre oméga-3, microbiote intestinal et neuro-inflammation. Les données précliniques et observationnelles suggèrent qu’en modulant les bactéries productrices de butyrate, l’EPA et le DHA peuvent renforcer la barrière intestinale et influencer positivement l’axe intestin-cerveau. Certaines formules associent acides gras, vitamines et probiotiques afin de potentialiser cette approche intégrée « cœur-cerveau-intestin ».
Un équilibre à retrouver
En France, le ratio moyen oméga-6/oméga-3 atteint , loin du rapport idéal situé entre et . Cet excès, lié à la consommation d’huiles raffinées et à la faible part de poissons gras, constitue un facteur pro-inflammatoire majeur.
Les sujets âgés, diabétiques, fumeurs ou stressés présentent une activité réduite de la δ-6-désaturase, enzyme clé de conversion de l’ALA, limitant encore davantage la synthèse d’EPA et DHA.
L’alcool, l’excès de sucre ou le déficit en zinc accentuent ce phénomène. Une supplémentation directe en EPA/DHA est alors particulièrement justifiée.
Évaluer le profil : estimer les apports en poissons gras, l’âge, la grossesse ou l’allaitement, le tabagisme et la prise éventuelle d’anticoagulants ou d’antiagrégants.
Choisir la forme adaptée : privilégier une origine marine ou algale certifiée, une huile purifiée et stabilisée, au dosage explicite en EPA/DHA ; proposer une alternative végétale en cas d’allergie ou d’intolérance.
Conseiller la prise : 250 à 500 mg/j d’EPA + DHA, en cure de 2 à 3 mois renouvelable, toujours au cours d’un repas pour une meilleure absorption.
Accompagner : rappeler les bases d’un mode de vie protecteur – alimentation méditerranéenne, réduction des oméga-6, activité physique et arrêt du tabac.
Quelles solutions conseiller ?
Omegabiane DHA (PiLeJe) : huile de poissons concentrée, apportant 250 mg de DHA et 56 mg d’EPA par capsule. Posologie : 1 à 3 capsules par jour, pendant un repas.
Bion3 Oméga 3 (P&G Health) : association d’EPA/DHA, de vitamines et du probiotique Bacillus subtilis DE111 (1 milliard UFC/capsule). Posologie : 1 capsule par jour, de préférence pendant ou après un repas.
Ergy 3 Oméga (Nutergia) : huile de poissons sauvages enrichie en vitamine E, fournissant, pour 3 gélules, 225 mg d’EPA et 150 mg de DHA. Posologie : 2 à 3 gélules par jour, au cours d’un repas.
Valbiotis Plus Oméga-3 : oméga-3 issus de micro-algues (Schizochytrium sp.), adaptés aux régimes végétariens et aux personnes allergiques au poisson. Chaque capsule apporte 289 mg de DHA et 144 mg d’EPA. Posologie : 1 capsule par jour, au cours d’un repas.
*JAMA Cardiology 2018 ; Mayo Clinic Proceedings 2019