PRÉVENTION & SANTÉ PUBLIQUE

Vaccination : mode d'emploi en pharmacie

La vaccination n'est plus un simple relais de prescription : elle est devenue un acte pharmaceutique à part entière. Prescription, injection, traçabilité et accompagnement : nous maîtrisons désormais la chaîne complète de prévention. Mais, entre extension de compétences, montée en puissance du numérique et évolution des attentes sociétales, la vaccination exige une approche plus clinique, rigoureuse et engageante.

Par Laurent Desbarres, publié le 25 novembre 2025

Vaccination : mode d’emploi en pharmacie

Un périmètre complet

Depuis l’arrêté du 8 août 2023, nous pouvons prescrire et administrer les vaccins du calendrier vaccinal national à partir de 11 ans, et le vaccin Covid dès 5 ans. Cela inclut le dTcaP, l’hépatite B, le HPV, les méningocoques, le pneumocoque, la grippe, le zona et, depuis mars 2024, le VRS, ainsi que leurs rappels. Seuls les vaccins vivants chez les personnes immunodéprimées et ceux destinés aux voyages internationaux demeurent exclus.

Quelles nouveautés ?

Prevenar 20® est désormais remboursé pour toutes les personnes de 65 ans et plus, avec un schéma en dose unique. Abrysvo® (Pfizer) introduit la vaccination anti-VRS : une dose entre 32 et 36 SA chez la femme enceinte, et une indication chez les plus de 75 ans ou plus de 65 ans présentant une comorbidité cardio-respiratoire. Ces innovations renforcent la cohérence du pack prévention : Grippe, Covid-19, Pneumocoque, Zona et VRS, à aborder ensemble lors des bilans de prévention par exemple.

 

Vaccination et réponse mémoire

Vaccination et réponse mémoire

©Claire Jouanneaux

 

Grippe : adapter le vaccin

Avec l’âge, la réponse immunitaire devient moins efficace : c’est le phénomène d’immunosénescence. Pour y remédier, deux formulations à privilégier chez les personnes de 65 ans et plus : Efluelda® et Fluad®. Ces deux vaccins compensent efficacement la baisse de production d’anticorps liée à l’âge. Flucelvax®, cultivé sur cellules MDCK, ne contient pas de protéines d’œuf ; il peut donc être utilisé aussi bien chez les sujets allergiques à l’ovalbumine que chez la population générale. Les autres vaccins, tels que Vaxigrip® et Influvac®, conservent leur place pour les sujets de moins de 65 ans sans facteur de risque particulier.

 

5 idées reçues à combattre

« Je suis enrhumé, donc pas de vaccin » : seul un épisode fébrile supérieur à 38,5 °C impose de différer la vaccination.

« À mon âge, c’est dangereux » : c’est justement l’inverse. L’immunosénescence rend la vaccination encore plus nécessaire.

« J’ai déjà eu la maladie » : une infection naturelle ne protège pas durablement, voire pas du tout, comme pour le zona.

« Les vaccins fatiguent » : ils stimulent une réponse ciblée et contrôlée, sans jamais affaiblir le système immunitaire.

« Les vaccins donnent la maladie » : c’est faux pour la quasi-totalité des vaccins, élaborés à partir de virus inactivés ou de fragments non infectieux incapables de se multiplier. Seuls certains vaccins vivants atténués, comme ROR, peuvent très rarement provoquer une réaction bénigne sans infection réelle – sauf chez les sujets immunodéprimés ou les femmes enceintes, chez qui ils sont contre-indiqués.

Du comptoir à la traçabilité

Chaque vaccination débute par une évaluation : âge, antécédents, traitements, grossesse éventuelle. « Chaque échange au comptoir peut devenir une opportunité : une petite plaie, la fameuse épine de rosier, un renouvellement d’ordonnance… autant de moments pour évoquer le rappel antitétanique ou le carnet vaccinal », explique M. Cluzeau, pharmacien titulaire à la Pharmacie Lafayette de Morlaàs (Pyrénées-Atlantiques).

La prescription suit les recommandations officielles, avec possibilité de co-administration avec le Covid-19 ou le Pneumocoque sur des sites distincts. Pour la traçabilité, le scan du QR code sur l’emballage enregistre automatiquement le numéro de lot.

Pensez à qualifier l’INS du patient pour que la remontée s’effectue directement dans son DMP.

Enfin, il faut adapter le tarif de facturation :

  • 7,50 € si réalisé sur ordonnance,
  • 9,60 € si prescrit et administré par le pharmacien.

Des outils numériques comme Apodis®, reliés au DMP, facilitent le repérage : « des pop-ups rappellent les rappels vaccinaux et aident à engager la discussion au bon moment », ajoute M. Cluzeau avant de conclure : « l’idée, c’est d’être proactif : si nous ne parlons pas vaccination, personne ne le fera à notre place ! ».

Laurent Desbarres
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