Listériose : épidémie en France liée à des fromages contaminés – Symptômes, risques et conduite à tenir

Depuis juin 2025, la France connaît une série de cas de listériose invasive liés à la consommation de fromages à pâte molle au lait pasteurisé issus d’un même site de production. Vingt et un cas confirmés, dont deux décès, ont été rapportés, majoritairement chez des patients présentant un terrain à risque. La bactérie incriminée, Listeria monocytogenes, constitue une cause majeure d’infections graves d’origine alimentaire dans les pays industrialisés. Cette situation rappelle l’importance, pour les professionnels de santé et particulièrement les pharmaciens, d’identifier précocement les patients exposés et de savoir orienter vers une prise en charge adaptée.

Par Thomas Kassab, publié le 13 août 2025

Listériose : épidémie en France liée à des fromages contaminés – Symptômes, risques et conduite à tenir

Situation épidémiologique

Les analyses épidémiologiques menées par Santé publique France ont établi un lien entre les cas et des lots de fromages distribués jusqu’au 9 août 2025. Les produits concernés, issus de la fromagerie Chavegrand (Creuse), ont été retirés des circuits de distribution. La capacité de L. monocytogenes à se multiplier à des températures de réfrigération et à persister dans les environnements de production alimentaire explique la propagation silencieuse de cette contamination.

Pathogénie et populations vulnérables

La listériose humaine survient principalement après ingestion d’aliments contaminés. L. monocytogenes franchit la barrière intestinale par translocation cellulaire, rejoint la circulation sanguine et peut envahir le système nerveux central ou le placenta. Les populations à haut risque sont bien connues : femmes enceintes (avec risque fœtal majeur), sujets âgés, patients immunodéprimés ou porteurs de comorbidités chroniques.

Présentation clinique

La période d’incubation peut atteindre 70 jours, rendant la corrélation alimentaire parfois complexe. Les manifestations vont de la bactériémie fébrile isolée aux formes neurologiques sévères (méningite, encéphalite, abcès cérébraux). Chez la femme enceinte, l’infection est souvent paucisymptomatique, mais les conséquences obstétricales peuvent être dramatiques : avortement spontané, mort fœtale in utero, infection néonatale précoce.

Conduite à tenir pour le pharmacien

Le rôle officinal est crucial dans l’identification et le conseil aux patients exposés.

  • En absence de symptômes : informer sur la durée d’incubation et recommander une surveillance clinique active pendant huit semaines. Chez la femme enceinte, orienter systématiquement vers une consultation médicale pour discussion d’une antibioprophylaxie (amoxicilline per os).

  • En présence de signes évocateurs (fièvre ≥ 38 °C, céphalées, signes neurologiques, troubles digestifs persistants) : recommander une prise en charge hospitalière immédiate.

Prise en charge thérapeutique

Le traitement de référence des formes invasives repose sur l’amoxicilline IV à forte dose, associée ou non à la gentamicine pendant les premiers jours, en fonction de la sévérité. Les céphalosporines de 3ᵉ génération sont inefficaces contre L. monocytogenes. Chez la femme enceinte, l’amoxicilline est également l’antibiotique de choix, y compris en prophylaxie.

Prévention

La prévention repose sur l’éviction des produits à risque par les populations vulnérables, le respect strict de la chaîne du froid et une hygiène rigoureuse dans la manipulation des aliments. Les pharmaciens, en tant que professionnels de premier recours, jouent un rôle clé dans le relais des recommandations sanitaires et la détection précoce des cas suspects.

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