Réforme des fauteuils roulants au 1er décembre 2025 : guide pratique
La réforme des fauteuils roulants bouleverse profondément les règles du jeu à l’officine : nouvelles catégories, limite stricte des locations à six mois, option d’achat encadrée, forfaits révisés, parcours renforcé pour les fauteuils modulaires… Dès le 1ᵉʳ décembre 2025, nous devons maîtriser ces changements pour orienter rapidement les patients, éviter les erreurs de facturation et rester à jour face aux nombreux cas de figure. Voici le guide pratique indispensable pour être immédiatement opérationnel au comptoir.
Ce qu’il faut avoir en tête
À partir du 1ᵉʳ décembre 2025, tous les fauteuils roulants (VPH des titres I et IV de la LPPR) relèvent d’une nouvelle nomenclature et d’un financement intégral : l’Assurance maladie prend en charge la base, les complémentaires couvrent le différentiel, avec l’objectif affiché de zéro reste à charge, dès lors que l’on respecte la catégorie LPP et le prix limite de vente (PLV).
Pour nous, en officine, la réforme change surtout :
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la logique “durée du besoin” (moins ou plus de 6 mois),
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la façon de prescrire et de facturer (achat / location courte durée / location longue durée),
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la structure de prix (base de remboursement + PLV + forfaits),
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la gestion des contrats en cours.
Premier réflexe au comptoir : 3 questions clés
Dès qu’un patient arrive avec une ordonnance de fauteuil, on gagne du temps en se posant immédiatement trois questions :
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Durée prévisible du besoin
- < 6 mois : logique location courte durée (LCD)
- ≥ 6 mois : logique achat ou location longue durée (LLD) pour certaines situations (pathologies évolutives, pédiatrie).
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Type de fauteuil visé
- manuel “standard” à pousser ou à auto-propulser,
- fauteuil de confort,
- fauteuil plus technique (modulaire, etc.).
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Qui a prescrit ?
- médecin (toutes catégories),
- ergothérapeute (pour de nombreux fauteuils manuels et modulaires),
- kinésithérapeute (pour la location courte durée de certains manuels standards).
Ces trois éléments déterminent très vite le bon “couloir” de prise en charge.
Comprendre les nouvelles catégories qui concernent le plus l’officine
La nouvelle LPPR répartit les fauteuils en 7 classes et 22 catégories.
Au comptoir, on rencontre surtout trois codes :
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FMP : fauteuil non modulaire ou modulaire manuel / à pousser “standard” : fauteuil de transfert, modèles de base type D200, Action 2, etc.

Fauteuil roulant D200
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FMPR : fauteuil manuel de confort (inclinaison, bascule, etc.) : ex : modèles type Inovys, Clematis.

Fauteuil roulant confort Inovys II E Evo à bascule électrique
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FRM : fauteuil roulant modulaire manuel de gamme supérieure : ex : Action 3, Action 4, modèles bariatriques, etc.

Fauteuil Roulant Action 3 Ng Light Invacare
Chaque catégorie a désormais :
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un prix de cession (ce que paie l’Assurance maladie au distributeur) ;
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un prix limite de vente (PLV) au-delà duquel tout dépassement reste à charge ;
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des forfaits associés possibles :
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forfait de mise à disposition / réglage (MAD) pour certains FRM,
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forfait de livraison à domicile,
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forfait d’entretien / SAV annuel.
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Moins de 6 mois : la location courte durée (LCD)
Principes généraux
La LCD concerne les patients présentant une incapacité de marche partielle ou totale provisoire, pour une durée évaluée à moins de 6 mois.
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Durée maximale : 26 semaines (2 × 13 semaines).
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Dégressivité : le tarif de remboursement baisse à partir de la 13ᵉ semaine.
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Pour certains cas, le prescripteur peut demander jusqu’à 13 semaines supplémentaires (sur accord), mais l’option d’achat n’est alors plus possible : on reste sur une logique “épisode de soins court”
Prescripteurs autorisés pour FMP / FMPR / FRM en LCD : médecin, ergothérapeute ou kinésithérapeute
Option d’achat à partir de 6 mois
Si, en pratique, le besoin se révèle plus durable que prévu (au-delà de 6 mois), le prescripteur peut :
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basculer vers une option d’achat : le fauteuil loué est cédé au patient à un tarif prédéfini par la LPPR (ex. pour un FMP, autour de 100 € de base, hors évolution ultérieure des tarifs).
Point crucial :
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l’option d’achat est possible à 6 mois, mais plus possible si on a prolongé la LCD jusqu’à 9 mois via la dérogation de 13 semaines supplémentaires.
Délai de carence d’un an et “épisodes de soins”
La réforme instaure un délai de carence d’un an entre :
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une LCD et un achat,
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ou deux périodes de LCD.
Mais, le texte fonctionne en “épisodes de soins” :
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si un second événement survient dans une indication différente (ex. fracture jambe gauche puis, quelques mois après, fracture jambe droite), une nouvelle LCD est possible sans attendre un an : on est sur deux épisodes distincts.
Au comptoir, dès qu’on voit revenir un patient pour une nouvelle ordonnance de fauteuil après une LCD récente, il faut donc :
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vérifier s’il s’agit du même motif ou d’un autre épisode,
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garder la main sur les dates de début / fin de la précédente location.
Besoin ≥ 6 mois : achat (et, plus rarement, LLD)
Achat “classique”
Pour une incapacité de marche permanente ou longue (> 6 mois), la réforme privilégie :
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l’achat d’un fauteuil (neuf ou remis en bon état d’usage),
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avec un remboursement intégral dès lors que le prix reste ≤ PLV.
Prescripteurs pour FMP / FMPR / FRM à l’achat :
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médecin (toute spécialité),
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ergothérapeute pour de nombreuses situations, notamment les FRM.
Pour certains FRM et fauteuils très techniques, on entre dans le parcours “personne en situation de handicap” :
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Évaluation des besoins par le prescripteur (fiche dédiée).
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Fiche de préconisations envoyée au distributeur.
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Essai de 2 modèles minimum, puis essai en conditions réelles (48 h à 7 jours).
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Prescription définitive du modèle retenu, puis facturation
Location longue durée (LLD)
La LLD est prévue pour :
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les pathologies évolutives,
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certains équipements pédiatriques.
En pratique officinale, on sera surtout confrontés à l’achat et à la LCD. La LLD restera largement gérée par les prestataires spécialisés, sur des fauteuils modulaires plus techniques (FRM, FRE, etc.).
Renouvellement, entretien, SAV
Renouvellement
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Délai standard :
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5 ans pour les adultes,
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3 ans pour les moins de 16 ans.
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Renouvellement “à l’identique” : même modèle, mêmes réglages : pas besoin de refaire tout le parcours FRM.
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Renouvellement anticipé possible :
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fauteuil hors d’usage, irréparable,
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évolution rapide de la pathologie ou de la morphologie (prise de poids majeure, aggravation neurologique, etc.), objectivée par une nouvelle prescription.
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Entretien et SAV
La réforme crée des forfaits SAV annuels, distincts de la garantie légale :
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Garantie de base : 2 ans (fabricant si achat d’un fauteuil neuf, distributeur si option d’achat après LCD).
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Forfaits SAV : prennent en charge pièces d’usure et réparations non couvertes par la garantie, ou les interventions au-delà des 2 ans.
Le distributeur doit pouvoir fournir un fauteuil de remplacement de même catégorie pendant la réparation.
Contrats de location en cours au 1ᵉʳ décembre 2025
C’est un point sensible au comptoir, surtout si on travaille déjà avec un prestataire type Locapharm.
D’après la fiche pratique ANFE et l’arrêté du 6 février 2025 :
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Les fauteuils prescrits avant le 1ᵉʳ décembre 2025 peuvent être facturés avec les anciens codes et tarifs encore pendant un an, jusqu’au 1ᵉʳ décembre 2026, pour “solvabiliser les dossiers en cours”.
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Parallèlement, les nouvelles spécifications techniques minimales pour les fauteuils à la location s’appliquent au plus tard au 1ᵉʳ décembre 2026 : les prestataires doivent adapter leur parc locatif progressivement.
En pratique, en officine, on doit :
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identifier, avec le prestataire, les dossiers :
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< 6 mois d’ancienneté au 1ᵉʳ/12/2025 : bascule vers la LCD “nouvelle formule”,
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entre 6 et 12 mois : discussion option d’achat / restitution,
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> 12 mois : poursuite de la facturation sur les anciens codes jusqu’à 1ᵉʳ/12/2026.
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prévenir les patients concernés :
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soit organiser une option d’achat si le besoin se prolonge,
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soit programmer la restitution du fauteuil s’il n’est plus justifié.
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Reste à charge : que dire au patient ?
Les communications officielles sont claires :
À partir du 1er décembre 2025, tous les fauteuils roulants seront pris en charge intégralement par l’Assurance maladie
Concrètement :
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Assurance maladie : rembourse la base tarifaire.
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Complémentaire santé (contrat responsable) : doit couvrir le différentiel jusqu’au PLV – c’est inscrit dans le “panier minimum” des contrats responsables, à l’image du « 100 % santé » optique / dentaire.
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Pour les bénéficiaires de complémentaire santé solidaire (C2S), le texte prévoit explicitement la prise en charge du différentiel.
En revanche, pour un patient sans mutuelle, il peut subsister un reste à charge si le prix pratiqué se situe au-dessus de la base de remboursement.
Au comptoir, la bonne formule reste donc :
Si le fauteuil reste dans le cadre des tarifs de la réforme et si vous disposez d’une complémentaire responsable, il ne devrait pas y avoir de reste à charge. Vérifions ensemble avec votre organisme, car les modalités techniques sont encore en cours de déploiement.
Trois cas pratiques pour se situer
Cas 1 – Entorse grave / fracture de cheville
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Durée prévisible : 2 à 3 mois.
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Prescription : FMP en location par le médecin.
Réflexes :
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on part sur LCD FMP, jusqu’à 13 semaines ;
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on informe le patient qu’il s’agit d’un fauteuil de courte durée, qui sera repris ;
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on garde trace de la date de début de location pour ne pas dépasser les 26 semaines.
Cas 2 – Patiente âgée avec maladie neurologique évolutive
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Durée prévisible : > 6 mois, besoin durable.
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Prescription par le neurologue : FRM en achat, avec recours à l’ergothérapeute.
Réflexes :
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on vérifie que le parcours “personne en situation de handicap” a été engagé (fiche besoins + fiches de préconisations) ;
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on s’assure que deux modèles ont été essayés et qu’un modèle a été retenu ;
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on contrôle la présence des options (bariatrique, appuis tête, etc.) sur l’ordonnance pour éviter les oublis de prise en charge.
Cas 3 – Patient déjà en location depuis 4 mois au 1ᵉʳ décembre
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Contrat ouvert début août 2025 pour un FMP en location.
Réflexes :
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on comptabilise 4 mois déjà facturés dans l’ancien cadre ;
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il reste 2 mois de LCD “réforme” avant d’atteindre les 6 mois ;
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on anticipe dès maintenant une option d’achat ou une restitution autour du 1er février 2026 si le besoin se poursuit.
Check-list express pour être à l’aise au comptoir
Sans multiplier les listes, on peut garder ce mémo en tête :
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Toujours demander la durée estimée du besoin (“moins ou plus de 6 mois ?”).
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Repérer rapidement la catégorie LPP (FMP, FMPR, FRM…) sur l’ordonnance.
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Vérifier qui a prescrit (médecin, ergo, kiné) et si cela colle à la catégorie.
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Pour une LCD, noter la date de début et anticiper la fin (26 semaines maxi).
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Pour un achat durable, penser au parcours d’évaluation dès qu’on voit un FRM ou un fauteuil très technique.
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En cas de doute sur le cumul ou la carence d’un an, ne pas hésiter à contacter le prestataire et/ou la caisse avec le patient.
| Point clé | Ce qu’il faut retenir en officine |
|---|---|
| Durée du besoin | < 6 mois → Location courte durée (LCD)
≥ 6 mois → Achat (ou LLD dans quelques cas spécifiques). |
| Durée de la location courte durée | Maximum 26 semaines (13 + 13). Prolongation possible jusqu’à 9 mois, mais sans option d’achat à la fin. |
| Option d’achat | Possible uniquement à 6 mois de LCD. Le fauteuil loué est cédé au patient au tarif LPP prévu. |
| Délai de carence | 1 an entre deux LCD ou entre LCD et achat, sauf s’il s’agit d’un nouvel épisode de soins (motif différent). |
| Prescripteurs autorisés | LCD : médecin, ergo, kiné (selon catégories).
Achat : médecin ou ergothérapeute pour FMP/FMPR/FRM. |
| Reste à charge | Théoriquement 0 € si PLV respecté et mutuelle responsable. C2S : prise en charge intégrale. Sans mutuelle : possible reste à charge. |
| Contrats déjà ouverts | >12 mois : anciens codes jusqu’en 2026. <12 mois : bascule vers les nouveaux codes ou option d’achat / restitution selon ancienneté. |