Médicaments à marge nulle : le Leem répond
Dans une interview accordée à Pharma365, le pharmacien et militant Laurent Filoche appelait à ne plus délivrer certains médicaments hospitaliers à marge nulle. Le Leem, organisation représentative des entreprises du médicament, nous a adressé un droit de réponse. L’occasion de revenir sur une fracture croissante entre les laboratoires pharmaceutiques et les officinaux.

Des prix trop bas, un système à bout de souffle
Le point de départ du débat : la délivrance en ville de médicaments hospitaliers, comme les analogues du GLP-1, aux prix élevés… mais aux marges quasi nulles pour les officines. Laurent Filoche, dans une interview publiée le 5 juillet, appelle à la désobéissance : « Il faut arrêter de délivrer des médicaments à perte. Ce n’est plus soutenable. »
Une position qui fait écho au malaise grandissant des titulaires, confrontés à une accumulation de tensions économiques : fin des remises sur les génériques, prix encadrés, inflation, baisse de fréquentation, augmentation des charges fixes.
Le Leem défend la viabilité de l’industrie
Contacté par Pharma365, le Leem a souhaité répondre, rappelant que les laboratoires aussi subissent la pression économique. Dans un droit de réponse adressé à notre rédaction, l’organisation déclare :
« La soutenabilité de notre système de santé repose sur celle des modèles économiques de ses acteurs essentiels : les entreprises du médicament que nous représentons, mais aussi celle des professionnels de santé et de nos collègues pharmaciens officinaux. »
Le Leem rappelle que la France pratique certains des prix du médicament les plus bas d’Europe, fragilisant particulièrement les entreprises positionnées sur les produits dits « matures » — princeps en fin de brevet, génériques, biosimilaires et hybrides.
Des économies intelligentes, pas des coupes arbitraires
À rebours des annonces récentes du gouvernement sur la baisse des prix, le Leem plaide pour une autre voie.
« Nous demandons de préserver les prix, et de rechercher des économies intelligentes, appuyées sur le bon usage des médicaments, le développement de parcours de soins en officine et la recherche d’efficience dans le système de soins grâce à nos innovations. »
Une approche qui résonne avec les attentes de nombreux pharmaciens, mais qui laisse une part d’ombre : l’absence de concertation dénoncée par l’organisation.
« Nous n’avons aucunement été associés aux propositions des pouvoirs publics. Nous demandons un travail collectif, avec concertation et collaboration. »
Une ligne de fracture au sein de la chaîne du médicament ?
Le différend entre industriels et pharmaciens ne date pas d’hier, mais il semble s’accentuer avec la disparition des marges sur certains traitements onéreux. D’un côté, les officines se sentent instrumentalisées, contraintes de distribuer des produits coûteux sans contrepartie. De l’autre, les laboratoires dénoncent un étau économique qui étrangle leur capacité à investir, notamment dans la production locale.
À défaut d’une réponse politique rapide, la chaîne de dispensation pourrait bien se fissurer, menaçant l’accès aux traitements pour les patients et l’équilibre d’un système déjà sous tension.
À suivre…
Dans ce contexte tendu, les prochaines semaines seront décisives : le ministère de la Santé, les syndicats d’officinaux (FSPF, USPO) et les représentants industriels (Leem, Gemme, Biosim) seront appelés à renouer le dialogue. Objectif : éviter que la défiance ne devienne rupture.