Après la PrEP VIH, la DoxyPEP pour les IST ?

Une prise unique de doxycycline après un rapport sexuel non protégé permet de réduire nettement le risque d’IST bactériennes. L’essai américain DoxyPEP démontre une efficacité durable, avec un profil de tolérance rassurant.

Par Thomas Kassab, publié le 27 août 2025

Après la PrEP VIH, la DoxyPEP pour les IST ?

IST en recrudescence : un besoin d’innovation préventive

La syphilis, la chlamydia et la gonorrhée repartent à la hausse dans de nombreux pays, avec des incidences particulièrement élevées chez les HSH et les femmes transgenres. Aux États-Unis, la recrudescence de la syphilis congénitale illustre l’ampleur du phénomène. Dans ce contexte, chaque option de prévention additionnelle mérite une évaluation attentive.

La doxycycline post-exposition, principe et logique

La stratégie consiste à administrer 200 mg de doxycycline dans les 24 à 72 heures suivant un rapport non protégé. L’objectif : limiter la réplication bactérienne avant que l’infection ne s’installe. Plusieurs essais menés depuis 2018 avaient suggéré une protection significative vis-à-vis de la chlamydia et de la syphilis, plus variable sur la gonorrhée. L’essai américain DoxyPEP apporte des données de grande ampleur.

L’essai DoxyPEP : design et population

Réalisé à Seattle et San Francisco, l’essai a inclus près de 600 participants (HSH et femmes transgenres), tous avec antécédent d’IST dans l’année.

  • Phase initiale : comparaison entre doxy-PEP et prise en charge habituelle.

  • Phase d’extension : tous les participants ont pu recevoir la prophylaxie.
    Le critère de jugement était la survenue d’une nouvelle IST bactérienne (syphilis, chlamydia ou gonorrhée) dans les trois mois suivant l’exposition.

Des résultats probants

Au terme du suivi, l’incidence cumulée des IST a été réduite d’environ 65 % chez les participants sous doxy-PEP par rapport aux soins standards.

  • Chlamydia : baisse proche de 80 % à 90 % selon le statut VIH.

  • Syphilis : réduction similaire, supérieure à 75 %.

  • Gonorrhée : efficacité plus modeste, autour de 55 %.

L’extension ouverte a confirmé le maintien de cette protection, avec des taux d’IST durablement plus bas chez les personnes ayant adopté la prophylaxie.

Tolérance et résistances : un suivi nécessaire

Aucun événement indésirable grave n’a été signalé. Les effets digestifs mineurs sont restés les plus fréquents.
Concernant la résistance, la proportion de gonocoques non sensibles à la tétracycline n’a pas différé de manière significative entre utilisateurs et non-utilisateurs, mais la vigilance reste de mise.

Un bénéfice réel, mais une vigilance indispensable

Si la DoxyPEP s’impose comme une avancée majeure pour réduire rapidement l’incidence des IST bactériennes chez les HSH et femmes transgenres, son utilisation massive soulève des questions de santé publique. Plusieurs travaux ont en effet montré une augmentation progressive des gènes de résistance aux tétracyclines chez Neisseria gonorrhoeae et un risque de sélection de résistances dans la flore commensale. Pour l’heure, aucun signal majeur n’a été directement attribué à la prophylaxie par doxycycline, mais la prudence est de mise : seule une surveillance microbiologique rigoureuse permettra de s’assurer que le bénéfice individuel ne s’accompagne pas d’un coût écologique et collectif en termes d’antibiorésistance.