ANEPF : cap sur la réforme du 3e cycle et la reconnaissance des étudiants !
À l’occasion du 61ᵉ congrès de l’ANEPF, tenu début juillet à Grenoble, une nouvelle équipe a été élue à l’unanimité pour porter la voix des 33 000 étudiants en pharmacie. À sa tête, notamment, Noémie Chantrel-Richard (présidente) et Syrine Ayed (porte-parole) prennent leurs fonctions dans un contexte de refontes majeures des études pharmaceutiques. Nous les avons rencontrées pour évoquer leurs priorités de mandat, les avancées concrètes sur la réforme du 3ᵉ cycle et les revendications portées pour faire évoluer le statut et les conditions de formation des futurs confrères.

Réforme du 3e cycle
La réforme du 3e cycle, attendue pour septembre 2026, mobilise depuis longtemps l’ensemble des acteurs institutionnels. « On touche au but ! », déclare Noémie Chantrel-Richard, originaire de Rouen. Les discussions impliquent la DGOS, les doyens des facultés de pharmacie, les maîtres de stage et le ministère de la Santé. Tous collaborent à l’élaboration des textes. L’objectif est de permettre aux universités de s’approprier ces nouveaux textes d’ici février 2026, lors des conseils pédagogiques, pour une mise en application à la rentrée universitaire suivante.
Un statut distinct pour les étudiants de 6e année
Aujourd’hui, les étudiants de 6e année officine relèvent du statut de stagiaire, avec une gratification maximale d’environ 550 € brut par mois. Un cadre jugé désuet et peu valorisant par l’ANEPF qui milite activement pour la création d’un statut propre à cette année particulière de formation, ni « interne », ni « simple stagiaire » universitaire.
« Ce que nous voulons, c’est un statut adapté à nos missions spécifiques, qui nous permette d’exister à part entière dans les structures officinales ou industrielles », insiste Noémie Chantrel-Richard. Syrine Ayed complète : « Ce nouveau statut permettrait de reconnaître concrètement notre engagement, nos compétences et notre place dans l’équipe officinale ».
La mise en œuvre d’un tel cadre passe nécessairement par un vecteur législatif, ce qui freine l’agenda. « Il faut soit une proposition de loi, soit s’insérer dans une loi existante. Et c’est justement sur ce point que l’on peine à trouver un accord », précise la présidente de l’ANEPF.
Repenser le premier cycle : vers une voie d’accès commune et cohérente
Autre chantier de réflexion porté par l’ANEPF : l’évolution du système d’accès aux études de santé. L’association propose une transformation vers une voie unique, plus lisible et cohérente, qui renforcerait l’intégration progressive des compétences santé dès la première année de licence. Dans le modèle défendu, le parcours licence santé (de L1 à L3) serait structuré de la manière suivante :
- Licence Santé 1 : les deux tiers du programme, soit 40 ECTS santé, sont consacrés à un tronc commun scientifique (biologie cellulaire, histologie, anatomie, chimie…) et à des modules obligatoires, dont un module de découverte des métiers de santé. Les 20 ECTS restants portent sur des enseignements disciplinaires propres à la filière choisie par l’étudiant.
- Licence Santé 2 : l’étudiant poursuit avec 10 ECTS dédiés à la culture de la santé, auxquels s’ajoutent 10 ECTS transversaux (ouverture, méthodologie…) et 40 ECTS disciplinaires traditionnels.
- Licence Santé 3 : la dernière année est centrée sur la consolidation disciplinaire, avec 50 ECTS disciplinaires traditionnels et 10 ECTS transversaux.
Ce modèle vise à créer un socle santé commun dès la L1, tout en maintenant une spécialisation progressive au sein des disciplines.
« Aujourd’hui, cette découverte des métiers est trop souvent cantonnée à des ressources en ligne, très passives. Nous voulons y intégrer des présentations de professionnels, des échanges avec les enseignants, et une implication forte des étudiants tuteurs », explique Syrine Ayed.
Approche par compétences : réforme silencieuse mais structurelle
En parallèle des grandes réformes visibles, un changement profond des méthodes d’enseignement est déjà engagé.
« La reforme de la 6e année remet en question les années précédentes », précise Noémie Chantrel-Richard.
Depuis la 2e année, les études pharmaceutiques adoptent progressivement une approche par compétences, en substitution des évaluations uniquement centrées sur l’acquisition théorique. « Par connaissances, on entend des notions apprises par cœur, souvent déconnectées de la pratique. L’approche par compétences impose au contraire de valider des actions concrètes, en lien avec les futurs rôles du pharmacien », poursuit-elle. Ce principe gagnera à être étendu aux 4e et 5e années, qui feront l’objet d’une réflexion à part entière après stabilisation du nouveau 3e cycle.
Malaise étudiant : des indicateurs préoccupants
L’un des moteurs du mandat actuel est la volonté de répondre au mal-être croissant des étudiants en pharmacie. « Les chiffres sont alarmants sur les conditions de vie, la satisfaction vis-à-vis des études, et la préparation à l’exercice professionnel », alerte Noémie Chantrel-Richard.
Ces constats sont issus du Grand Entretien 3.0, une enquête nationale conduite début 2025, qui a aussi mis en lumière le manque d’intégration de thématiques majeures : numérique en santé, transition écologique, santé environnementale. « Ce sont des sujets nécessaires à retravailler, car ils font partie intégrante du futur de notre profession », renchérit Syrine Ayed.
Syrine Ayed : « Un combat dans lequel je me reconnais »
Originaire de Nancy, Syrine Ayed s’est engagée à l’ANEPF avec détermination : « un petit grain de folie… mais surtout l’envie de s’engager et d’aider ! » Un de ses déclics ? « Apprendre qu’un étudiant sur trois a déjà envisagé d’arrêter ses études à cause du mal-être, c’est affolant. Pourtant, peu de choses sont mises en place pour les soutenir ».
Son engagement repose aussi sur une adhésion forte aux valeurs défendues par l’association. « Je me suis dit : c’est un combat qui me concerne, dans lequel je me reconnais. Et je pense que beaucoup d’étudiants s’y retrouvent aussi », conclut-elle. Son objectif : porter la voix des étudiants, défendre leurs droits et accompagner l’évolution de leur formation.