“Adjoint cherche reconnaissance désespérément” : une profession en quête de sens

Ils sont 3 sur 4 à aimer leur métier. Et pourtant… 1 sur 3 envisage de le quitter d’ici 5 ans. Dans une enquête inédite menée auprès de 3 000 pharmaciens adjoints, l’Ordre (Section D) révèle un double visage : celui d’un métier passionnant et utile, mais sous-estimé, fragilisé et parfois en rupture de sens. Un signal fort envoyé à toute la profession.

Par Thomas Kassab, publié le 04 juin 2025

“Adjoint cherche reconnaissance désespérément” : une profession en quête de sens

Adjoint par choix, mais jusqu’à quand ?

Ils aiment leur travail, leurs collègues, leurs patients. Et ils ne s’en cachent pas : 75 % des pharmaciens adjoints se disent fiers d’exercer. Une majorité loue la qualité des relations humaines en officine, notamment avec les préparateurs (8,2/10) et les patients (7,5/10), et apprécie de s’impliquer dans les nouvelles missions de santé publique.

Mais cette fierté coexiste avec un désenchantement silencieux. 57 % estiment que leur métier s’est dégradé, 31 % envisagent même de changer de métier sous 5 ans. Conditions de travail détériorées, patients plus agressifs, surcharge administrative, pénuries chroniques… La lassitude gagne du terrain.

Engagés… mais freinés

Seulement 22 % des adjoints se projettent aujourd’hui comme titulaires. Pourtant, si l’on ajoute ceux qui aimeraient entrer dans le capital de leur officine sans changer de statut, ce sont 43 % qui souhaitent s’investir durablement. Le chiffre grimpe à 71 % chez les moins de 40 ans.

Pourquoi cet écart entre envie et passage à l’acte ? Parce qu’ils se heurtent à des limites statutaires (seulement 10 % de parts autorisées au capital), au manque de perspectives d’évolution… et à un manque de reconnaissance institutionnelle.

Indépendance professionnelle : entre principe et réalité

86 % des adjoints se disent “libres dans leur exercice quotidien”. Un chiffre glaçant :

Mais 45 % avouent avoir déjà dû prendre une décision contraire à la réglementation, sous la pression d’un supérieur, d’un patient ou d’un prescripteur.

33 % jugent que leur indépendance professionnelle s’est détériorée en 10 ans. La délivrance hors AMM (61 %), la gestion des commandes ou l’encadrement des préparateurs sont identifiés comme des zones grises, où la ligne éthique devient floue.

Un besoin d’outils et de soutien

La majorité des adjoints ignore encore les dispositifs d’aide mis en place par l’Ordre. En cas de situation conflictuelle, c’est au titulaire qu’ils s’adressent en premier lieu… même si celui-ci est parfois à l’origine du problème.

L’Ordre, lui, est interpellé. 41 % des répondants veulent qu’il soit plus actif sur la défense de l’indépendance professionnelle. Parmi les propositions plébiscitées : création d’un espace d’écoute, fiches réflexes, arbres décisionnels, dialogue structuré au sein des équipes.

Et maintenant ? Ce que la profession doit entendre

👉 Cette enquête est un électrochoc silencieux :

  • Oui, les adjoints aiment leur métier.

  • Non, ils ne se sentent pas toujours respectés dans leur rôle.

  • Oui, ils veulent s’investir dans l’officine.

  • Mais non, ils ne le feront pas à n’importe quel prix.

Titulaires, institutions, syndicats, Ordre : il est temps d’écouter cette majorité silencieuse, sans quoi la pharmacie de demain perdra des forces vives… par lassitude, frustration ou départ.

📎 L’enquête complète et les dispositifs d’alerte sur le site de l’Ordre.

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