Journée mondiale Parkinson – Pharma365 à la conférence d’alerte de France Parkinson
Une épidémie silencieuse en pleine accélération
La maladie de Parkinson connaît une expansion sans précédent. « En 2024, 12 millions de personnes sont touchées dans le monde, un chiffre que l’on n’attendait pas avant 2040 », alerte Amandine Lagarde, directrice générale de France Parkinson. À l’horizon 2050, les projections évoquent 25,2 millions de malades. En France, 270 000 patients sont actuellement diagnostiqués, avec 27 000 nouveaux cas chaque année. La pathologie concernera une personne sur 50 dans sa vie.
La prévalence a bondi de +274 % entre 1990 et 2021. Elle représente désormais une des principales causes de handicap à l’échelle mondiale, selon l’OMS.
Une pathologie qui touche plus les hommes, mais pas de manière uniforme
Parkinson affecte davantage les hommes que les femmes, avec des formes cliniques parfois différentes. Les femmes présentent souvent une réponse thérapeutique distincte et des effets secondaires spécifiques. Environ 20 % des patients sont diagnostiqués avant 65 ans, souvent encore en activité professionnelle. Certains cas apparaissent dès l’âge de 30 ans. Bien que les données épidémiologiques n’indiquent pas clairement une hausse chez les jeunes, France Parkinson constate une augmentation des demandes émanant de cette population.
Une maladie complexe et plurifactorielle
Deuxième pathologie neurodégénérative après Alzheimer, Parkinson ne se limite pas aux tremblements. « On recense plus de 60 symptômes, moteurs et non moteurs », rappelle Amandine Lagarde. Les symptômes moteurs typiques incluent la bradykinésie, la rigidité et les tremblements – absents chez un tiers des malades.
Mais ce sont les signes non moteurs (troubles du sommeil, douleurs, fatigue chronique, constipation, dépression…) qui altèrent le plus la qualité de vie. Cette symptomatologie complexe et évolutive exige une prise en charge personnalisée et continue.
Le facteur environnemental : pesticides en ligne de mire
Au-delà du vieillissement (responsable de 89 % de l’augmentation des cas selon les projections), les facteurs environnementaux sont désormais incontournables. L’exposition aux pesticides est formellement associée à un risque accru. En France, les zones viticoles – 3 % des terres, mais 20 % de l’usage national de pesticides – sont particulièrement touchées. Le paraquat, le glyphosate et l’effet cocktail des formulations sont pointés du doigt.
France Parkinson a rejoint un recours européen contre la réautorisation du glyphosate pour 10 ans, malgré son classement par l’OMS comme cancérogène probable et les fortes suspicions de neurotoxicité.
Un système de santé inadapté à l’urgence
Depuis la fin du plan Maladies Neurodégénératives (2014-2019), la France n’a plus de politique publique dédiée à Parkinson. Une stratégie 2024-2028, co-construite avec les associations et experts, est finalisée mais toujours en attente d’officialisation. « Nous avons le sentiment que la France fuit ses responsabilités », déplore l’association.
Le pays compte 26 centres experts labellisés, mais la majorité des patients est suivie en ville. L’enjeu : déployer des professionnels spécialisés sur le terrain, notamment les infirmiers en pratique avancée (IPA).
Vers une coordination ville-hôpital avec les infirmiers Parkinson
Inspiré des « Parkinson Nurses » anglo-saxons, le modèle d’infirmier de coordination commence à émerger dans certains centres experts. Mais France Parkinson plaide pour une généralisation en ville, dans les territoires de santé prioritaires.
Des expérimentations en Bretagne (Côtes-d’Armor, Finistère) ont démontré l’intérêt d’un accompagnement renforcé par un IPA Parkinson : réduction des hospitalisations, meilleure observance, fluidification du parcours. L’association appelle à un financement national de ces dispositifs, ainsi qu’à la formation ciblée des professionnels.
Éducation thérapeutique : un levier sous-utilisé
Moins de 5 % des patients bénéficient de programmes d’Éducation Thérapeutique du Patient (ETP), pourtant essentiels dans l’adaptation des traitements et l’autonomisation. France Parkinson milite pour une ETP accessible en ville, en ligne ou par des IPA, et souhaite une révision du parcours de soins HAS de 2016 pour y intégrer ces évolutions.
Recherche : une dynamique forte, mais un manque de moyens publics
La France dispose d’un réseau solide avec NS-Park (27 centres experts), d’une cohorte de plus de 25 000 patients (PD-MIR), et d’essais cliniques d’envergure comme l’étude FÉPARK (dopamine intracérébrale) ou l’étude de parc (repositionnement d’antidiabétiques).
Le lancement du MASTER TRIAL, plateforme d’essais cliniques dédiée aux maladies neurodégénératives, marque un tournant. Mais les financements publics restent limités. En comparaison, les États-Unis ont voté en 2024 le Parkinson’s Act, une loi historique à financement massif, et des fondations privées (Michael J. Fox, Sergey Brin) y ont déjà injecté des milliards de dollars.
Pharmaciens : vigies et acteurs du parcours de soins
La complexité des traitements antiparkinsoniens, leur fenêtre thérapeutique étroite et les risques d’interactions font du pharmacien un acteur central dans l’accompagnement thérapeutique. Détection des signes d’alerte, relais vers les soins spécialisés, soutien à l’ETP, lien avec les aidants : les missions officinales sont nombreuses.
Face à une pathologie en pleine expansion, le pharmacien de ville doit être intégré dans un parcours coordonné, structuré, et valorisé.