Rémunération officinale : les pharmaciens ont tranché, le modèle doit évoluer !

Un signal d’alerte massif venu du terrain

Pendant plus d’un mois, les syndicats départementaux ont recueilli les contributions de près de 5 000 pharmacies, en métropole comme en outre-mer. Un volume inédit, révélateur d’un malaise profond.
Le constat est largement partagé : le modèle économique de l’officine est jugé en danger, fragilisé par la baisse continue des prix des médicaments, la diminution des volumes et l’accumulation de missions insuffisamment financées.

Pour autant, les pharmaciens ne réclament pas une rupture brutale. Ils demandent une transformation progressive, lisible et sécurisée, recentrée sur leur cœur de métier : la dispensation et le conseil.

Les honoraires, pilier assumé du modèle de demain

Premier enseignement fort de la consultation : le modèle de l’honoraire est plébiscité.
Mis en place il y a une dizaine d’années, il est perçu comme un rempart face aux baisses de prix et comme une rémunération plus stable de l’acte professionnel.

Les attentes exprimées sont nettes :

  • Maintien des honoraires existants,

  • Revalorisation de l’honoraire à l’ordonnance, qui rémunère le cœur du métier,

  • Création de nouveaux honoraires pour reconnaître la diversification croissante des missions.

Dépistages, renouvellements, interventions pharmaceutiques, coordination avec les prescripteurs, orientation dans le parcours de soins, gestion administrative ou situations complexes : autant d’actes jugés essentiels mais encore trop souvent réalisés sans reconnaissance financière.

Marge commerciale : un attachement fort, mais à repenser

Si les honoraires sont largement soutenus, les pharmaciens ne souhaitent pas devenir dépendants d’un modèle exclusivement forfaitaire.
La marge commerciale reste un socle indispensable, mais ses modalités actuelles sont contestées.

La profession appelle à :

  • un aménagement de la marge dégressive lissée,

  • la création de tranches supplémentaires,

  • une révision des seuils,

  • et une revalorisation de la rémunération des médicaments onéreux, dont la dispensation mobilise un temps et une expertise importants.

L’objectif est clair : préserver une marge sécurisée, cohérente avec la réalité économique des officines.

ROSP : utiles, mais trop complexes

Les rémunérations sur objectifs de santé publique font l’objet d’un regard plus critique.
Jugées pertinentes dans leur principe, elles sont aussi considérées comme trop complexes, parfois déconnectées des missions réellement exercées au comptoir.

Les pharmaciens demandent :

  • des objectifs plus atteignables,

  • mieux alignés avec leurs pratiques quotidiennes,

  • et une simplification du dispositif.

Plusieurs axes sont cités comme prioritaires : substitution biosimilaire, lutte contre l’antibiorésistance, dépistages, observance thérapeutique.
La profession propose également la mise en place d’un forfait structure, destiné à rémunérer le rôle de service public de l’officine sur son territoire, en particulier dans les zones sous-dotées.

Vers un modèle mixte, progressif et pérenne

Au-delà des outils, c’est une vision globale qui se dégage de la consultation.
Les pharmaciens appellent à un basculement progressif vers un modèle mixte, associant :

  • une rémunération par actes et missions,

  • une marge commerciale sécurisée,

  • des ROSP recentrées sur la santé publique,

  • et un forfait structure reconnaissant le rôle territorial de l’officine.

Surtout, un point fait consensus : le temps pharmaceutique aujourd’hui non financé doit être reconnu. Orientation des patients, situations cliniques complexes, gestion des ruptures, sorties d’hospitalisation ou petits soins d’urgence constituent le quotidien des équipes officinales, sans traduction économique réelle.

Un socle pour les travaux IGAS-IGF et l’avenant conventionnel à venir

Ces résultats constituent désormais la base de travail officielle des discussions engagées avec la mission IGAS-IGF, dont les conclusions sont attendues début 2026.
L’objectif affiché est clair : faire émerger un modèle économiquement viable, compatible avec les évolutions du métier, et se matérialisant dans un avenant n° 2 à la convention pharmaceutique.

Pour la profession, 2026 s’annonce comme une année charnière, faite de négociations, d’arbitrages et de choix structurants.
Le diagnostic est posé. Les attentes sont exprimées. Reste désormais à transformer l’essai.