Santé des adolescents et des jeunes adultes : les conseils clés à l’officine

Comprendre pour mieux agir

L’adolescence est une période pivot où l’enfant quitte le cadre pédiatrique pour se construire comme jeune adulte. Entre bouleversements physiques, psychiques et sociaux, les repères changent et les comportements de santé se forment. Fatigue, acné, troubles du sommeil, anxiété ou désinvestissement scolaire sont fréquents et souvent minimisés. Dans ce moment de fragilité, la pharmacie se distingue par sa proximité et sa confidentialité : un lieu d’accès simple, sans rendez-vous, où l’adolescent peut venir sans crainte ni jugement.

Un âge charnière

À cet âge, la relation au soin oscille entre autonomie et besoin de reconnaissance. L’adolescent veut comprendre et décider, sans être infantilisé. Le ton employé compte : parole claire, écoute bienveillante, reconnaissance de sa maturité. Il faut expliquer le cadre de confidentialité – ce qui est dit reste entre nous, sauf danger pour lui – pour instaurer la confiance. Notre rôle est d’accueillir, reformuler et orienter si besoin. Les questions ouvertes et la validation des émotions« c’est normal de se sentir dépassé pendant les examens » – favorisent un dialogue durable.

Une étude parue dans Sexual Health révèle que les préservatifs sont souvent mal utilisés, réduisant fortement leur efficacité contraceptive et protectrice. Au comptoir, rappeler les bons gestes – ouverture délicate, pincement du réservoir, déroulage complet, usage unique – permet de prévenir les échecs et de renforcer le rôle éducatif de l’officine.

Un parcours d’accueil clair

Structurer l’entretien assure cohérence et sécurité du conseil. Tout débute par l’identification du motif de venue : explicite (vaccination, douleur, acné) ou implicite (fatigue, anxiété). L’échange doit permettre d’évaluer la situation et de tracer l’intervention. Après cette étape : conseiller, agir ou orienter vers un médecin, un CeGIDD ou une Maison des adolescents. Noter brièvement l’échange et proposer un suivi – rappel vaccinal ou évolution d’un traitement – renforce la continuité du soin.

Des situations particulières

Certains adolescents vivent en foyer, centre éducatif ou structure de la Protection judiciaire de la jeunesse, avec un accès restreint aux soins. La pharmacie devient un point d’ancrage essentiel. Coordonner avec les équipes éducatives, préparer les piluliers, préciser les modalités de prise et signaler tout incident assurent la sécurité et la continuité thérapeutique. Le pharmacien agit comme repère stable pour des jeunes au parcours souvent morcelé.

Vaccination

La vaccination reste l’un des piliers majeurs de la prévention, mais aussi un levier de dialogue avec les adolescents et leurs familles. Cette période coïncide avec les rappels du calendrier vaccinal et l’introduction de nouveaux vaccins à fort impact de santé publique. Entre pédiatre moins présent et médecin traitant pas encore identifié, la pharmacie s’impose comme un point d’accès privilégié, à la fois pratique, confidentiel et pédagogique. En maîtrisant le calendrier, la traçabilité et la communication, l’équipe officinale devient le pivot de la vaccination adolescente, garantissant couverture optimale et suivi cohérent.

Cadre et compétences

Depuis la réforme d’août 2023, nous pouvons prescrire et administrer l’ensemble des vaccins inscrits au calendrier vaccinal, aux personnes de 11 ans et plus, à l’exception des vaccins vivants atténués chez les personnes immunodéprimées et des vaccins destinés aux voyageurs (fièvre jaune, typhoïde, encéphalite japonaise, etc.), qui restent du ressort du médecin ou du centre de vaccination international.

Chaque injection doit être encadrée avec rigueur : vérification du statut vaccinal (carnet de santé ou Mon Espace Santé/DMP), traçabilité du lot, information claire sur les bénéfices et effets attendus, et recueil du consentement du jeune et, le cas échéant, de l’autorisation parentale.

L’équipe officinale doit disposer d’une trousse d’urgence complète (avec adrénaline auto-injectable) et connaître le protocole de gestion d’un malaise vagal ou d’une anaphylaxie. Même si la surveillance post-injection de 15 minutes n’est pas une obligation réglementaire, elle reste fortement recommandée, notamment à l’adolescence où les malaises vagaux sont fréquents.

À noter : la vaccination et la prescription vaccinale nécessitent une formation préalable agréée et une déclaration d’activité auprès de l’Ordre.

Le parcours vaccinal des adolescents

Le calendrier vaccinal adolescent s’articule autour de quatre priorités : rappels obligatoires, prévention des IST, lutte contre les méningites et rattrapage vaccinal.

Entre 11 et 13 ans

Le rappel dTcaP reste la pierre angulaire, avec Repevax® (Sanofi Pasteur) ou Boostrix Tetra® (GSK). Cette étape est aussi l’occasion de vérifier la protection contre l’hépatite B et la rougeole, et d’initier si besoin un rattrapage (hépatite B : Engerix® B20, HBVaxPro® ; rougeole : Priorix® ou M-M-R VaxPro®).

Papillomavirus

La vaccination contre le HPV est recommandée pour tous les adolescents, filles et garçons, de 11 à 14 ans révolus, selon un schéma à deux doses espacées de six à douze mois.

En rattrapage entre 15 et 19 ans, un schéma à trois doses (0, 2 et 6 mois) est appliqué.

Le vaccin de référence, Gardasil 9® (MSD), protège contre 9 génotypes oncogènes.

Lancée en 2023, la campagne scolaire en classe de 5ᵉ a permis d’améliorer la couverture vaccinale, mais de nombreux adolescents restent non vaccinés ou incomplets.

Méningocoques : deux vaccins, deux logiques

Depuis 2024, le vaccin Nimenrix® (Pfizer), ciblant les sérogroupes A, C, W et Y, est recommandé entre 11 et 14 ans, avec rattrapage possible jusqu’à 24 ans. Il peut être administré en même temps que le HPV.

Le méningocoque B représente une protection complémentaire, particulièrement indiquée pour les jeunes vivant en collectivité, présentant un antécédent familial ou résidant en zone à risque. Deux vaccins sont disponibles :

  • Bexsero® (GSK) : deux doses espacées d’un mois minimum,
  • Trumenba® (Pfizer) : deux schémas possibles : à 2 doses (deux injections espacées de 6 mois) ou à 3 doses (deux injections à au moins 1 mois d’intervalle, suivies d’une 3e dose au moins 4 mois après la deuxième).

Cette vaccination peut être proposée et initiée à l’officine, avec orientation médicale si besoin, dans une logique de prévention élargie et proactive.

Mise en œuvre à l’officine

Tout débute par la vérification du statut vaccinal. À l’aide du LGO, de Mon espace santé ou d’un module de suivi vaccinal intégré (comme Apodis, interfacé avec le DMP et la carte Vitale), l’équipe identifie les rappels manquants et construit un plan vaccinal personnalisé.

Le rendez-vous suit une trame claire : accueil, consentement, injection, observation recommandée de 15 minutes, puis traçabilité dans le DMP et programmation du rappel.

Les officines les plus organisées réservent des créneaux dédiés aux adolescents – le mercredi, en fin de journée ou le samedi matin – et valorisent leur service via une signalétique explicite : « Vaccination HPV ici ».

IST, contraception et sexualité

Aborder la sexualité des adolescents reste un exercice délicat, souvent redouté au comptoir. Peur de gêner, crainte de maladresse, regard des parents : les obstacles sont nombreux. Pourtant, la pharmacie fait partie des rares lieux où un adolescent peut poser ses questions sans jugement, obtenir une réponse fiable et, si besoin, une orientation rapide. L’enjeu est double : protéger sans stigmatiser, éduquer sans moraliser.

Préservatifs : lever les freins

Depuis janvier 2023, les préservatifs externes et internes sont remboursés à 100 % pour les moins de 26 ans, et à 60 % au-delà, sur prescription médicale.

Préservatif Eden® de Majorelle

Préservatif Eden® de Majorelle

 

Les gammes concernées incluent Eden® (Laboratoires Majorelle) pour le préservatif externe – désormais disponibles en versions Classic, XL, Parfumés et Perlés, cette dernière intégrant la LPPR depuis janvier 2025 – et Sure & Smile® ou So Sexy & Smile® (Terpan) pour le préservatif interne.

Préservatif Sure & Smile® de Terpan

Préservatif Sure & Smile® de Terpan

 

 

Malgré cette prise en charge, les préservatifs internes ne représentent encore que 4 % des ventes, selon Terpan. Ce dispositif, souvent méconnu, souffre d’un manque d’information : beaucoup ignorent sa prise en charge intégrale et son intérêt en matière d’autonomie féminine.

Préservatif interne Sexy & Smile® de Terpan

Préservatif interne Sexy & Smile® de Terpan

 

 

Discret, efficace et simple d’usage, le préservatif interne peut être posé jusqu’à huit heures avant le rapport, protège des IST et des grossesses non désirées, et évite les irritations liées au latex grâce à sa composition en nitrile.

Comme le souligne Alexandra Guérin, Responsable R&D, Qualité et Affaires Réglementaires chez Terpan : « Beaucoup de pharmaciens ignorent encore que les préservatifs internes sont entièrement pris en charge pour les moins de 26 ans. »

Promouvoir le préservatif interne, dit féminin, c’est défendre une égalité de choix entre les deux dispositifs. C’est aussi l’occasion, au comptoir, de présenter visuellement les différentes gammes disponibles – internes et externes, tailles, textures ou matières – en les montrant directement au patient. Cette approche concrète brise la glace plus facilement qu’une simple question orale du type « Quelle taille ? » et permet de valoriser la diversité des modèles remboursés, tout en instaurant un dialogue bienveillant et décomplexé autour de la sexualité et de la prévention.

 

Dépistage : accompagner sans alarmer

Le dépistage des IST doit être présenté comme une démarche de santé routinière, non comme une suspicion. La HAS et Santé publique France recommandent un dépistage systématique de la chlamydiose chez les femmes de 15 à 25 ans, à renouveler à chaque changement de partenaire.

L’entretien peut s’appuyer sur une phrase simple : « À votre âge, on recommande un dépistage de routine, même sans symptôme. » Le prélèvement se fait en laboratoire ou dans un CeGIDD, sans ordonnance ni avance de frais.

Chez les hommes, le dépistage est proposé en cas de conduites à risque, symptômes urinaires ou partenaire infectée. Les autotests VIH vendus en pharmacie complètent l’offre : leur fiabilité est excellente si le test est réalisé trois mois après la prise de risque. En cas de résultat positif ou douteux, il faut réorienter immédiatement vers un CeGIDD.

Pilules

Lors de la délivrance, rappelons que la pilule peut répondre à des objectifs thérapeutiques (acné hormonale, confort menstruel, cycles étendus), à discuter au cas par cas selon les contre-indications et le profil de risque.

Pilules œstroprogestatives à visée dermatologique

Les associations à base d’éthinylestradiol et d’acétate de cyprotérone (Diane 35® et génériques) disposent d’une indication dans le traitement de l’acné modérée à sévère chez la femme, après échec des traitements dermatologiques. Elles assurent également une contraception efficace. Leur délivrance impose une vigilance particulière sur le risque thromboembolique veineux et sur la bonne compréhension du traitement par la patiente : il s’agit avant tout d’une approche dermatologique, avec un suivi régulier et une évaluation de la tolérance.

D’autres associations contenant de la drospirénone/éthinylestradiol (Yaz®, Jasminelle®, Jasmine®) peuvent améliorer les troubles cutanés légers et régulariser les cycles. Même si ces formules n’ont pas d’indication spécifique dans l’acné, elles présentent souvent un intérêt clinique chez les femmes présentant une acné hormonale légère ou des signes prémenstruels marqués.

Alternatives sans estrogène

Chez les patientes présentant une intolérance aux estrogènes (migraines, nausées, tension mammaire) ou des contre-indications vasculaires (tabagisme après 35 ans, antécédents thromboemboliques, etc.), les pilules progestatives pures à base de désogestrel 75 µg représentent une option sûre et bien tolérée. Il faut toutefois informer sur la fréquence possible d’aménorrhées ou de spottings, et insister sur la prise quotidienne stricte, avec une tolérance de retard limitée à douze heures pour garantir l’efficacité contraceptive.

Schémas prolongés – « cycle étendu »

Certaines pilules œstroprogestatives, comme Seasonique® (éthinylestradiol/lévonorgestrel), se prennent en cycle prolongé de 91 jours. Ce schéma n’interrompt pas complètement les règles, mais les espace à une seule fois par trimestre, avec des saignements plus courts et moins abondants. Il vise à améliorer le confort menstruel, notamment chez les femmes souffrant de dysménorrhées, de migraines cataméniales ou d’endométriose légère. En début de traitement, des spottings sont possibles et doivent être expliqués pour éviter tout abandon prématuré.

Traitement hormonal de l’endométriose

À ne pas confondre avec les contraceptifs : Endovela® (diénogest 2 mg) est un progestatif continu indiqué dans l’endométriose. Il peut supprimer les menstruations, mais dans un objectif thérapeutique, non contraceptif. Si une contraception est souhaitée pendant le traitement, il faut orienter vers une méthode non hormonale. Un accompagnement régulier au comptoir permet d’aider à la bonne observance et de repérer les effets indésirables éventuels (spotting prolongé, troubles de l’humeur, tension mammaire).

Le message clé

Ces situations rappellent qu’il n’est jamais normal de souffrir pendant ses règles. Une douleur persistante ou invalidante doit conduire à une réévaluation médicale et, le cas échéant, à une adaptation du schéma contraceptif.

Contraception d’urgence

L’échange autour d’une pilule du lendemain doit avant tout être rassurant, confidentiel et centré sur l’écoute. Il s’agit d’adopter un ton bienveillant, sans jugement, et de valoriser la réactivité de la patiente : venir tôt, c’est déjà bien agir. Le dialogue débute par quelques questions neutres – date du rapport, contraception habituelle, éventuels traitements – qui permettent d’évaluer la période du cycle et d’orienter vers la molécule la plus adaptée, sans retarder la délivrance.

Deux options sont disponibles :

  • lévonorgestrel : à prendre le plus tôt possible, dans les 72 heures suivant le rapport,
  • ulipristal acétate : efficace jusqu’à 5 jours, y compris en période ovulatoire. L’ulipristal est à privilégier en cas de rapport proche de l’ovulation ou si plusieurs rapports ont eu lieu dans le même cycle.

 

Lorsqu’une contraception hormonale est déjà en cours, les consignes diffèrent : après lévonorgestrel, la pilule peut être reprise dès le lendemain, en utilisant un préservatif pendant 7 jours ; après ulipristal, il faut attendre au moins 5 jours avant de reprendre une contraception hormonale, tout en se protégeant par préservatif durant toute cette période. Ce délai évite une perte d’efficacité par interaction entre les progestatifs et l’ulipristal.

Le conseil pharmaceutique inclut la prise immédiate, la reprise en cas de vomissement dans les trois heures, la protection par préservatif jusqu’aux prochaines règles et la réalisation d’un test de grossesse si elles ne surviennent pas sous trois semaines. C’est aussi un moment privilégié pour ouvrir le dialogue sur la prévention : proposer des préservatifs, rappeler le dépistage des IST et, si besoin, orienter vers un centre de planification ou un professionnel de santé pour mettre en place une contraception régulière et adaptée.

Réseaux et orientation

L’efficacité du conseil officinal repose sur la capacité à orienter sans jugement. Les CeGIDD assurent gratuitement le dépistage et la prise en charge des IST, VIH et hépatites. Les CPEF offrent un accès libre à la contraception, à la contraception d’urgence et à un accompagnement en cas de violences ou IVG. Les Maisons des adolescents complètent ce réseau avec un soutien psychologique et médical global.

Peau, acné, estime de soi

L’acné est une dermatose inflammatoire chronique fréquente à l’adolescence, liée à une hyperséborrhée, une obstruction du follicule pilo-sébacé et une inflammation secondaire. Ses répercussions psychosociales sont souvent importantes, d’où la nécessité d’une prise en charge claire et suivie.

Physiopathologie et grades

Quatre mécanismes physiopathologiques sont en jeu : hyperséborrhée, hyperkératinisation folliculaire, prolifération de C. acnes et inflammation.

Les formes cliniques varient : rétentionnelle (comédons ouverts ou fermés), inflammatoire (papules, pustules) ou nodulaire/conglobata (lésions profondes à risque cicatriciel).

L’évaluation du grade de sévérité (I à IV) oriente la stratégie : traitement topique seul pour les formes légères, association ou voie systémique pour les formes modérées à sévères.

L’entretien au comptoir doit aussi rechercher les facteurs aggravants : cosmétiques comédogènes, frottements, stress, tabac, troubles hormonaux, certains médicaments (corticoïdes, progestatifs androgéniques, lithium), voire vitamines B6/B12 ou exposition solaire excessive.

Première ligne médicale

Peroxyde de benzoyle (Cutacnyl®)

Antibactérien, kératolytique et légèrement anti-inflammatoire, il détruit Cutibacterium acnes sans induire de résistance. Appliqué en fine couche le soir sur peau propre et bien sèche, il agit sur les lésions inflammatoires et rétentionnelles. Mieux vaut débuter à faible concentration (2,5 % ou 5 %) et augmenter selon la tolérance. Il peut décolorer les tissus : se laver soigneusement les mains après usage. Une légère irritation ou sécheresse est fréquente les premières semaines ; la protection solaire quotidienne est indispensable.

Rétinoïdes topiques

Adapalène (Differine®) : kératolytique et anti-inflammatoire, il normalise la différenciation des kératinocytes et prévient la formation des comédons.

Trétinoïne (Effederm®, Retacnyl®) : régule la kératinisation et limite la rétention sébocornée.

Ces traitements s’appliquent le soir sur peau propre, en évitant les paupières et les lèvres. Une irritation transitoire est classique ; il faut alors espacer les applications, introduire un soin hydratant non comédogène et renforcer la photoprotection. Ils sont contre-indiqués pendant la grossesse et l’allaitement.

Acide azélaïque (Skinoren®, Finacea®)

Bien toléré et dépourvu de photosensibilisation, il combine action antibactérienne, kératolytique douce et effet dépigmentant léger. C’est une alternative intéressante pour les peaux sensibles ou à tendance pigmentaire, et une option validée dans la rosacée papulo-pustuleuse. Application une à deux fois par jour selon tolérance.

Associations fixes

Epiduo® (adapalène + peroxyde de benzoyle) : traitement complet des acnés mixtes, à appliquer le soir sur l’ensemble des zones atteintes. La version Epiduo® forte (0,3 % adapalène) est réservée aux formes modérées à sévères.

Zanea® (clindamycine + trétinoïne) : indiqué dans les acnés inflammatoires modérées, sur prescription médicale et pour une durée limitée (8 à 12 semaines maximum), afin de prévenir les résistances bactériennes.

 

Les traitements antiacnéiques demandent 10 à 12 semaines avant d’en juger l’efficacité. Le suivi repose sur trois points : observance, tolérance et réponse clinique.

En cas d’irritation, il faut espacer les applications, hydrater davantage et renforcer la photoprotection. Si l’acné persiste ou s’aggrave, une orientation médicale vers un traitement oral (cyclines ou isotrétinoïne) s’impose.

Au comptoir, rappeler les bons gestes : ne pas toucher les lésions, appliquer le traitement sur toute la zone, éviter la superposition de produits actifs et poursuivre malgré l’amélioration pour prévenir les rechutes.

Gestion de la tolérance et observance

Une tolérance cutanée optimale conditionne l’efficacité : appliquer sur peau bien sèche, éviter les produits irritants ou astringents, espacer temporairement en cas de brûlure, associer un hydratant non comédogène et un écran solaire SPF ≥ 30. Expliquer ces mesures favorise l’adhésion au traitement et limite les abandons précoces.

 

Principaux médicaments susceptibles de provoquer de l'acné

Principaux médicaments susceptibles de provoquer de l’acné

 

Dermo-cosmétique adjuvante

La réussite du traitement dépend étroitement du soutien cosmétique. L’objectif est de réparer la barrière cutanée, de limiter la sécheresse induite par les traitements et de prévenir les rechutes.

Nettoyant doux sans savon (gel ou mousse micellaire), sans alcool ni gommage mécanique.

Hydratant barrière non comédogène, idéalement enrichi en céramides ou niacinamide, comme Effaclar H Iso-Biome® (La Roche-Posay), Sébium Sensitive® (Bioderma) ou Cleanance Hydra® (Avène).

Photoprotection quotidienne avec un SPF 30 à 50 fluide et matifiant : indispensable, car les traitements topiques photosensibilisent.

Camouflage correcteur : pour améliorer l’observance en limitant l’impact esthétique, à l’instar de du Stick correcteur teinté anti-imperfections de La Rosée.

 

Check-list rétinoïde chez la femme en âge de procréer

Check-list rétinoïde chez la femme en âge de procréer

 

 

Sommeil, écrans, rythmes

Sommeil insuffisant, réveils nocturnes, fatigue chronique, perte de concentration… Ces plaintes, banales au comptoir, traduisent souvent un trouble du rythme veille-sommeil accentué par les écrans, les excitants et le stress scolaire. Chez l’adolescent, ces déséquilibres ne sont pas anodins : ils perturbent la croissance, la mémoire et la régulation émotionnelle.

Le plan d’hygiène du sommeil

L’adolescent doit comprendre que la régularité prime sur la durée. Un lever constant au moins cinq jours sur sept stabilise le rythme circadien, même si le coucher varie légèrement. L’exposition à la lumière naturelle du matin (ouvrir les volets dès le réveil, marcher 10 minutes à la lumière du jour) favorise la sécrétion de cortisol et la synchronisation biologique.

L’activité physique, idéalement quotidienne, améliore la qualité du sommeil profond. En revanche, les séances intenses tardives (après 20 heures) peuvent retarder l’endormissement.

La déconnexion numérique reste le levier principal : au moins une heure sans écran avant le coucher. L’usage du smartphone au lit retarde l’endormissement de 30 à 60 minutes par exposition lumineuse, même avec « mode nuit ».

Enfin, la sieste courte (10 à 20 minutes, avant 16 heures) aide à récupérer sans désynchroniser le rythme.

L’équipe officinale peut remettre une fiche imprimée « plan sommeil », claire et positive, à cocher chaque semaine : lever constant, lumière, activité, écran, sieste.

Boissons énergisantes

Les adolescents sous-estiment la charge en caféine des boissons énergisantes : une canette standard en contient environ 80 mg, soit l’équivalent d’un espresso, souvent combinée à la taurine, au guarana et au sucre. Ces produits, consommés en période d’examens ou avant le sport, provoquent tachycardie, nervosité et insomnie.

Les effets d’accoutumance et d’anxiété doivent être explicités, tout comme les risques cardiovasculaires et de troubles du sommeil. Les parents doivent être inclus dans la discussion : les restrictions imposées sans explication sont inefficaces, alors qu’un plan de réduction raisonné est mieux accepté.

Mémoire, concentration, examens

À chaque période d’examens, le comptoir devient un observatoire de la fatigue : demandes de « booster », troubles du sommeil, pertes d’attention. La tentation du complément miracle est forte, mais les bases physiologiques demeurent incontournables. Avant toute supplémentation, il faut restaurer le socle : sommeil, alimentation, hydratation et gestion du stress.

Les bases incontournables

La mémoire et la concentration reposent d’abord sur une bonne hygiène de vie :

  • un sommeil suffisant et régulier,
  • un petit-déjeuner riche en protéines et fibres pour stabiliser la glycémie,
  • une hydratation continue (1,5 l d’eau/jour),
  • des pauses visuelles selon la règle 20-20-20 : toutes les 20 minutes, regarder à 20 mètres pendant 20 secondes.

Ces mesures, simples mais concrètes, améliorent plus durablement la vigilance qu’un excitant ponctuel.

Micronutrition : raison garder

Le recours aux compléments alimentaires doit rester ciblé et rationnel :

  • Magnésium/B6 : utile en cas de stress ou de fatigue nerveuse,
  • Fer : seulement en cas de carence confirmée,
  • Oméga 3 : soutien des fonctions cognitives et de la plasticité neuronale.

Phytothérapie et aromathérapie

Certaines plantes présentent un intérêt documenté :

  • Rhodiola rosea : adaptogène, améliore la résistance au stress et la performance cognitive en situation d’examen,
  • Bacopa monnieri : effet modéré sur l’attention et la mémoire,
  • Passiflore et mélisse : apaisantes, adaptées aux troubles anxieux légers, sans somnolence.

Les huiles essentielles doivent rester secondaires : la diffusion d’orange douce ou de petit grain bigarade favorise la détente, mais les ingestions sont déconseillées chez les mineurs.

Santé mentale et TCA

L’adolescence est une période d’intenses transformations émotionnelles. L’irritabilité, l’isolement ou les troubles alimentaires ne traduisent pas toujours une crise d’opposition, mais parfois une souffrance psychique.

Les signaux faibles à repérer

Sommeil désorganisé, perte d’appétit, baisse scolaire, propos négatifs sur soi, automédication anxiolytique ou recours excessif aux écrans sont des indicateurs d’alerte. Ces signes doivent inciter à un questionnement discret mais ciblé.

TCA

Les troubles du comportement alimentaire (TCA) apparaissent fréquemment entre 13 et 20 ans. Vomissements, amaigrissement rapide, aménorrhée, hyperactivité sportive ou rituels alimentaires doivent alerter. En cas de vomissements répétés, éviter le brossage immédiat des dents : l’acide gastrique fragilise l’émail ; recommander un rinçage au bicarbonate ou un bain de bouche fluoré neutre. L’équipe peut proposer un accompagnement transitoire : compléments hyperprotéinés, conseils dentaires adaptés, écoute active, puis orientation vers une structure spécialisée (anorexie/boulimie).

Sphère bucco-dentaire

Souvent reléguée derrière l’acné ou le sommeil, la santé bucco-dentaire reste pourtant un pilier de la prévention adolescente. Entre fin de dentition mixte, port d’appareils orthodontiques, changements hormonaux et habitudes sucrées, l’adolescence est une période à haut risque carieux.

Caries, érosions, bagues et sports

Boissons acides, brossage irrégulier, traitements asséchants : l’émail est mis à rude épreuve. Les porteurs de bagues présentent un risque élevé de plaque et de déminéralisation. Quelques rappels essentiels : limiter grignotages et boissons sucrées ou acides ; boire de l’eau après un soda ; mâcher un chewing-gum sans sucre au xylitol si brossage différé ; porter un protège-dents pour les sports de contact.

Technique et matériel

Deux brossages par jour, deux minutes avec une brosse souple, jamais dure. Préférer un dentifrice fluoré 1 000-1 500 ppm ; pour les jeunes à risque carieux, un gel fluoré renforcé. Le fil dentaire ou les brossettes interdentaires complètent le nettoyage, surtout avec appareil.

Orthodontie

L’appareillage augmente le risque de gingivite et de déminéralisation. Les indispensables : brosse à dents orthodontique à brins biseautés en « V » pour nettoyer efficacement autour des brackets, brossettes interdentaires et bain de bouche sans alcool.

Certains aliments sont à éviter : caramels, chewing-gums collants, fruits secs durs.

Le protège-dents thermoformé reste obligatoire pour les sports de contact.

En cas d’irritation, un peu de cire orthodontique sur le bracket et un gel gingival, type Pansoral©, suffisent souvent à apaiser la muqueuse.

 

Programme M’T dents

Le programme M’T dents de l’Assurance Maladie propose un examen gratuit et pris en charge à 100 % à 12, 15, 18, 21 et 24 ans. Un message Ameli invite chaque jeune à prendre rendez-vous en ligne via QR code. Un adolescent suivi tôt devient un adulte avec moins de soins lourds et une meilleure observance.

Les conduites addictives

Une période de vulnérabilité à accompagner

L’adolescence constitue une phase de vulnérabilité majeure face aux conduites addictives : alcool, tabac, cannabis, mais également jeux vidéo, réseaux sociaux ou paris en ligne. La curiosité, la recherche d’appartenance et la pression du groupe favorisent les expérimentations précoces. Dans ce contexte, les Consultations Jeunes Consommateurs (CJC) représentent un levier essentiel de prévention. Créées en 2004, elles offrent un accueil gratuit, anonyme et confidentiel, accessible avec ou sans les parents.

Animées par des équipes spécialisées (psychologues, éducateurs, médecins, assistants sociaux), elles permettent d’évaluer la consommation, d’accompagner le jeune et, si besoin, d’orienter vers une structure adaptée. Leur approche repose sur l’écoute et la réduction des risques, loin de toute stigmatisation.

Des structures spécialisées et gratuites

Les CSAPA (Centres de Soins, d’Accompagnement et de Prévention en Addictologie) complètent le dispositif. Ils accueillent adolescents et jeunes adultes confrontés à une addiction avec ou sans produit, de manière libre, anonyme et gratuite.

Leur prise en charge repose sur une équipe pluridisciplinaire (médecins addictologues, psychologues, infirmiers, travailleurs sociaux) qui assure la prévention, la réduction des risques infectieux, le soutien psychologique et, si nécessaire, la substitution médicamenteuse. Ces structures offrent un accompagnement global, sans jugement, pour favoriser la réduction ou l’arrêt des consommations.

Des contacts anonymes et accessibles

Lorsque l’adolescent ne souhaite pas se déplacer, il peut être orienté vers des lignes d’écoute anonymes : Drogues Info Service (0800 23 13 13), Écoute Cannabis (0980 980 940) ou Tabac Info Service (39 89). Ces ressources, souvent méconnues, offrent une première écoute, des conseils personnalisés et un soutien à distance. Elles permettent de briser l’isolement et d’encourager une démarche volontaire d’aide.

Un cadre législatif et des campagnes fortes

Ces dispositifs s’inscrivent dans une politique publique coordonnée par la MILDECA, qui pilote depuis 1982 la lutte contre les conduites addictives. Le Plan national 2018-2022, la campagne Mois Sans Tabac, la sensibilisation scolaire et l’encadrement strict de la publicité et de la vente de tabac, d’alcool et de jeux d’argent visent à créer un environnement protecteur pour les mineurs. L’objectif : prévenir avant de sanctionner.

par Thomas Kassab, DU de Pharmacie clinique